Pythagore, une phobie presque universelle

Illustration by Ray Verchere

By Lea Lysa; double published in the BEE3 Magazine

Dans le bus de ville, j’entends malgré moi, à travers la musique de mes écouteurs, une conversation intrigante entre deux jeunes filles :

  • Nous en maths, on a commencé les révisions, vraiment j’ai tout oublié.
  • Oui nous aussi, on fait le théorème de Pythagore : ma phobie ! »

Qu’entends-je ? Les mathématiques seraient-elles vues comme une peur ? Des connaissances à éviter ? Une science à bannir ?

En discutant avec nos amis, on remarque qu’ils manifestent un certain manque d’affection (c’est le moins qu’on puisse dire) envers cette matière, qui est perçue comme difficile, ennuyante, et parfois même inutile ! Nous allons donc nous intéresser à ce fameux mathématicien et son théorème, qui suscitent (ou ont suscité) une crainte à certains d’entre nous.

Pythagore aurait-il donc gâché la vie d’écoliers avec son théorème ?

Bien sûr que non. Du moins, je doute que telles étaient ses intentions. Pythagore était un mathématicien né à Samos, en Grèce, au VIème siècle avant notre ère. Il fonda l’école Pythagoricienne qui, avec un peu de recul, peut nous paraître être une secte qu’on essaye d’éviter à tout prix. Les pythagoriciens se réunissaient pour parler de science et aspiraient à un mode de vie éthique ; on raconte qu’afin d’intégrer l’école, les disciples devaient passer cinq ans en silence complet. De nombreuses rumeurs farfelues courant sur Pythagore et ses disciples, difficile de savoir lesquelles sont vraies. Par exemple, les pythagoriciens auraient eu une interdiction stricte quant à la consommation de haricots, en raison de flatulences causées par ces derniers. Cicéron, homme d’état romain du premier siècle avant J-C, écrit dans son ouvrage De divinatione « D’où l’interdiction aux pythagoriciens de ne pas manger de haricots, car cette nourriture cause des flatulences, ce qui s’oppose à la tranquillité de l’esprit chercheur de la vérité absolue ».

Pythagore est la star des maths chez les jeunes, reconnu pour le théorème le plus célèbre du monde : le Théorème de Pythagore. En réalité, il n’était pas le premier à avoir découvert cette relation. On retrouve des traces du Théorème de Pythagore chez les Égyptiens, près de mille ans auparavant ! Ce théorème, nous le connaissons tous : dans un triangle rectangle, le carré de l’hypoténuse est égal à la somme des carrés des deux autres côtés.

Cette énonciation on l’a apprise, oubliée, étudiée, oubliée à nouveau jusqu’à ce qu’elle reste dans nos mémoires à tout jamais, aucun doute là-dessus. C’est un théorème apprécié car, relativement simple, une seule formule enveloppe l’essentiel du chapitre. Mais qu’est-ce qui fait réellement sa beauté ?

Tout d’abord, comme on aime en maths, on remarque un lien direct entre deux branches mathématiques à priori différentes : l’arithmétique (étude des nombres) et la géométrie (étude du plan et de l’espace). En effet, les nombres carrés sont liés à des triangles rectangles, alors que ces deux notions semblent sans rapport.

Ensuite, c’est un théorème qui possède énormément de démonstrations. En mathématiques, les démonstrations sont un processus essentiel : on ne peut pas dire que le Théorème de Pythagore est vrai sans preuve, même si l’on étudie une infinité de triangles qui le vérifient. Il existe des centaines de démonstrations, dont 340 dans le recueil « The Pythagorean Proposition » de Elisha Loomis, publié en 1940.

Enfin, la beauté du théorème de Pythagore se trouve dans ses applications pratiques. Un exemple est le repérage par satellites, et le fonctionnement de GPS. Si l’on reste en deux dimensions, le GPS sur notre téléphone définit notre position par rapport à un point à vol d’oiseau : grâce aux latitudes et longitudes, qui sont perpendiculaires, le théorème de Pythagore est applicable : la distance à vol d’oiseau n’est en réalité que l’hypoténuse d’un triangle rectangle formé par un segment de longitude et de latitude. On peut également appliquer ce théorème dans un plan à trois dimensions, où les satellites repèrent notre position par rapport à la latitude, longitude et hauteur au-dessus du niveau de la mer.

Bien que les mathématiques puissent sembler décourageantes, complexes, effrayantes même, elles contiennent un monde rempli de beauté et questionnement. Notre initiation à cette science commence dès le plus jeune âge, où, parfois, les chapitres s’oublient un à un. Selon moi, leurs prestige et intérêt ne sont pas négligeables, comme nous l’a montré l’exemple le plus fameux du Théorème de Pythagore. Mais la quête de l’élégance de cette science ne s’arrête pas là…