En plein coeur de Paris, tour spectaculaire… À vendre

Vous avez déjà deviné de quoi il s’agit ? 

S’agit-il des ruines d’un château-fort médiéval, d’un clocher en style roman… ?  

Il ne faut pas aller chercher trop loin, car oui, c’est bien la célèbre tour Eiffel ! 

Construite lors de l’Exposition universelle de Paris, en 1889, après deux années de durs et laborieux travaux, la tour Eiffel fait 324 mètres de hauteur et était, à l’époque, le monument le plus haut du monde ! Même si elle était initialement prévue comme une construction temporaire, en voyant l’intérêt que lui accordait le public, la décision de ne pas la démanteler a été prise.  

Néanmoins, pour préserver sa structure et l’entretenir, l’état doit investir une somme considérable.  

Elle doit être repeinte en moyenne tous les 7 ans (comme demandé par son créateur, Gustave Eiffel), dans trois tonalités de couleurs différentes, la plus claire en haut et la plus foncée en bas, pour assurer une perception unifiée des tons du ciel parisien, afin que le monument semble mince dans le ciel. C’est donc un travail très délicat, qui nécessite une main d’œuvre spécialisée, capable de travailler à une hauteur considérable. 

L’importance artistique de la Tour sera redécouverte après la Première Guerre mondiale. 

Les années vingt, les Années Folles, c’est l’époque des premiers spectacles de cabaret ; le jazz fait ses premiers pas et les gens ont envie de reprendre leur vie. Le contexte économique reste très délicat, et le maintien de la Tour Eiffel, si cher et pourtant nécessaire, n’est évidemment pas prioritaire. 

La presse de l’époque s’occupe de la crise économique qui frappe la France et, en 1925, parait un article qui conclut « Devra-t-on vendre la tour Eiffel ? ». 

À partir de cet article, un jeune homme, Victor Lusting, fera sa fortune.  

Mais comment et qui est cet homme ?  

Malgré sa bonne éducation (il parle cinq langues couramment !), depuis son jeune âge, il gagnait sa vie en jouant aux cartes, embarqué sur les transatlantiques, en trompant les voyageurs privilégiés des croisières. Après le début du conflit, ces routes maritimes se firent de plus en plus rares et il décida d’émigrer vers les Etats-Unis, où il devint ensuite un proche du plus célèbre gangster de l’époque : Al Capone. Selon la légende, Lusting lui aurait même arnaqué 5000 $.  Cette raison expliquerait sa fuite soudaine vers la France, à Paris. 

C’est ici, en France, qu’il mènera à bout le plus grand coup de sa carrière.  

Dans les semaines qui suivent la parution de l’article mentionné précédemment, il prépare le plan parfait. 

 Il se fait passer pour un fonctionnaire du gouvernement et envoie aux cinq plus grandes entreprises de récupération de ferraille une invitation : le gouvernement français souhaite vendre la Tour Eiffel et cherche un acheteur. Le message semble totalement plausible, vu les circonstances.  

Le jour donné, l’escroc rencontre les cinq propriétaires à l’Hôtel de Crillon, l’un des hôtels les plus élégants de la ville. André Poisson est le plus naïf et se laisse convaincre.  

Après la conclusion de l’affaire, Lusting s’enfuit en Autriche, et ce n’est que trois jours après que Monsieur Poisson se rendra compte d’avoir été trompé, mais il a tellement honte qu’il ne le dénonce pas.  

Lusting va essayer de répéter cette escroquerie, mais sans succès, cette fois : le client est plus prudent et décide de tout raconter à la police.   

Il doit partir aux États-Unis pour fuir la police française. Mais peu importe : il connait déjà l’environnement et sait comment se comporter afin de ne pas éveiller de soupçons. Il l’a déjà fait, après tout… 

C’est dans ce pays qu’il va mourir. Après avoir passé de longues années parmi les escroqueries, les jeux de hasard, les faux billets et les fuites, il est incarcéré dans la prison d’Alcatraz, où il mourra en 1947. 

Monsieur Lusting restera dans l’histoire comme le vendeur le plus talentueux et certainement doué de fantaisie, ce qui n’enlève pas qu’il était un escroc.

Eleonora Gobbi (MAM S7ita)